Angoisse de fin de siècle. Metamorphoses, c’est l’album du renouveau pour Jean-Michel Jarre. Il propose pour moitié des morceaux conçus pour le formatage radio, avec une foule de collaboratrices de talent, et pour moitié de morceaux planants instrumentaux. Et pour la première fois, des chansons en bonne et due forme (les voix ont été passées à la moulinette électronique). Le résultat est étonnant. Il se dégage de certains titres une émotion particulière. Le rapprochement avec le groupe «Air» tourne vite court quand on se penche sur l’extraordinaire richesse du matériau sonore proposé ici. À deux-trois morceaux insipides («Tout est bleu») ou besogneux («Give me a sign» et le très New Agien «Miss Moon») près, je ne doute pas que ce disque pourra être écouté avec plaisir dans dix ou quinze ans comme un sommet d‘originalité dans la discographie de Jean-Michel Jarre.
> Un parfum de Revolutions…
À mon avis, c’est une manière de concrétiser l’essai raté dans le décevant album Revolutions. Il y a d’ailleurs une foule de similitudes avec cet album. Tout d’abord, le duo avec Natacha Atlas, la chanteuse égyptienne. Ce duo formidable fait beaucoup mieux que Revolutions, car il n’y a plus de partage entre le synthé et le chant. Tout cela se mêle très bien. Ensuite vient, dans mon ordre de préférence, «Hey Gagarin» , qui est très enlevé, avec une section de cordes synthétiques et «Gloria Lonely boy» , qui emprunte le son des années 90, mais avec un supplément d’âme. On sent aussi que Jarre tente de rattraper en marche le mouvement French Touch, en signant quelques titres où domine le vocoder. Pour ceux que l’irruption du chant perturberait dans ce nouvel album, ils peuvent se rabattre sur les «Millions of star» «Miss Moon» ou «Bells» qui sont des titres conventionnel.
> …et un zeste de Zoolook
Une chanson hommage à George Pérec «Je me souviens» ouvre l’album, elle n’est pas inoubliable, mais en même temps, elle n’est pas sans une certaine poésie. Des textes en anglais, interprétés par Laurie Anderson (la complice du projet Zoolook) viennent se greffer sur une «pattern» de batterie déglinguée. Dans la même veine, le violon (un vrai cette fois-ci) de Sharon Corr anime le titre «Rendez-vous à Paris». Original mais pas génial. Bref, de l’expérimental, tout en restant très radio friendly. Au rayon des déceptions, «Give me a sign» est une sorte de titre disco sans inspiration, un sous-Cerrone. «Tout est bleu» m’évoque les pires heures des boys band. Comment diable Jean-Michel Jarre s’est-il laisser aller à ça ? Hormis ces deux erreurs, les 10 autres chansons ont chacune un charme particulier, sans être des insoupçonnables. Ce disque est aussi un moyen détourné de rentrer petit à petit dans la musique sans paroles, 100% électronique.
> Titres de Metamorphoses
- Je me souviens (4:25)
- C’est la vie (7:11) L’excellent premier single extrait de l’album
- Rendez-vous à Paris (4:19)
- Hey Gagarin (6:20)
- Millions of stars (5:41)
- Tout est bleu (6:01) Le décevant deuxième single issu de l’album
- Love love love (4:26)
- Bells (3:49)
- Miss Moon (6:08)
- Give me a sign (3:49)
- Gloria, lonely boy (5:31)
- Silhouette (2:29)
Le saviez vous ?
- Nous sommes en 2000. Les clips de Sting (un autre de mes artistes préférés) et Jarre ont eu la même idée à quelques mois d’intervalle. Un duo avec Cheb mami pour l’un, »Desert Rose », l’autre accompagnant Natasha Atlas aux synthés, « C’est la vie ». Et, dans chacun des clips, nos deux gentlemen de prendre des poses sérieuses à l’arrière d’une voiture, muni chacun d’une caméra DV. Comme j’aime beaucoup ces deux artistes, cela me ferait trop de peine de devoir attribuer la paternité du concept à l’un ou à l’autre. Match nul donc, messieurs.
- Pour parvenir aux 12 titres finalement contenus sur la galette, Jean Michel a écarté pas moins de vingt autres chansons qu’il avaient composé dans cette période fin de siècle. Nul d’autre qu’elle serviront sur les albums suivants ! Parmi celles-ci, une piste intitulée Crazy Saturday, qui sera réinterprétée sous le nom Metamorphoses au festival Global tekno, puis distribué sous le nom Body Language dans le cadre du produit Itunes « Live at the Printemps de Bourges, 2002.
- L’album a été joué en avant première la veille de sa sortie au restaurant le Man Ray lors d’un mini-concert devant quelques centaines d’invités.
Les sons le plus bizzares : Je ne sais pas si cela avait déjà été fait avec tant de justesse, mais j‘aime bien l’utilisation d’un son qui évoque un dispositif d’arrosage automatique sur le titre Miss Moon. Et j’ajouterai le « bip-bbiip ! » de la connection 56 Ko qui sert de matrice au sublime morceau Hey gagarin.
À vous la parole !
> Ressources sur le web
- La fiche de l’album sur Aerozone.
- Eléments biographiques pour cet album
- Album suivant : Sessions 2000 (2002), Geometry of Love (2003)
> Critiques anglophones de professionnels
(Traduit de l’anglais)
» Enregistré en 2000 et pas disponible aux Etats-Unis avant 2004, Métamorphoses est une autre de ces énormes productions par le maître de la musique électronique française. Offrant un éventail de chansons, Jarre et son armada de clavier – un merveilleux mélange de technologies vintage et dernier cri – plonge dans la notion de changement et d’évolution avec une efficacité remarquable en dépit du nombre pléthorique d’invités chanteuses ou instrumentistes. Ses collaborations avec Laurie Anderson (je me souviens) et Natacha Atlas (C’est la vie) sont magnifiquement réussies. Ce premier titre est un morceau conduit par une séquence dont la pulsation varie à mesure que les paroles sont articulées d’une manière syncopée dans des cadences alternantes. Le deuxième est un titre house orientalisant, avec des éléments de disco, de breakbeat, et même de jungle qui rentrent et qui sortent du mix après avoir laissé des traces d’eux-mêmes pour permettre de comprendre leur articulation. Atlas chante et soupire, suivant des séquences de rythmes brisés et baignant dans des pulsations acid-house tandis qu’un violon solitaire caresse les temps de breaks dans une orgie de tempos croissants avant un final de rythmiques trance. Les autres vocalistes sont Lisa Jacobs (Millions of stars), Deirdre Dubois (Miss Moon) et Véronique Bossa (Give me a sign). Du fait de ses nombreuses couleurs musicales, Métamorphoses est le plus aventureux enregistrement de Jarre depuis une décennie, et il articule son langage de musicalité transculturelle et son altruisme futuriste d’une manière fantastique. »Thom Jurek, Allmusic.com / Titres sélectionnés : Je me souviens, C’est la vie, Millions of stars, Give me a sign / Note 4/5.
10 septembre 2007 à 12:14
Kraftwerk et Kate Bush devaient participer à cet album, malheurusement cela ne s’est pas fait. Kraftwerk ayant tout simplement refusé et Kate Bush a du se décommander au dernier moment. Dommage, je pense que cela aurait été très interessant comme concept.
..::Webmaster::.. Merci de cette info, effectivement, Jarre avait pensé à elle pour elle pour le titre « Give me a sign ». Quand à Kraftwerk, Jarre n’a jamais été très tendre avec leur musique et leur concept de groupe (prisonniers de leurs machines, déclare-t-il à leur sujet). Dommage dans les deux cas !
19 décembre 2007 à 21:41
J’ai souvent passé cet album en fond sonore lors de soirées.
Sans prevenir qu’il s’agit de JMJ.
Les personnes les plus hermetiques à JMJ que je connaisse dans mon entourage, on toute apprécié cet album.
Et ma plus grande joie était de leur préciser au final qu’il s’agit de JMJ !
8 septembre 2008 à 17:51
j’adore c’est la vie je ne sait toujours pas comment ma mere a deviné que c’etais jarre……….. bon album mais il part un peut n’importe ou
son le plus bizarre ba tout est bleu est vraiment invraisemblable sa comment avec un bulletin meteo et un theme un peut simplet (les paroles soit il s’est pas foulé soit il voulais coller avec le reste d ela musique un truc etrange voir ridicule)
6 février 2009 à 20:49
J’ai une tendresse pour le titre « light my sky », réécriture du « Tout est bleu » tant décrié.
9 novembre 2009 à 15:59
J’ai une tendresse particulière pour cet album. Il mèle thèmes grands public et expérimentations. Et je trouve le rendu final excellent, très chaud, alors qu’il a été entièrement enregistré avec Pro Tools (dans le genre 100 % numérique, ça s’impose).
28 février 2010 à 23:53
Oui un album surprise par sa conception différente qui fait suite aux plus conventionnels Chronologie et Oxygène 7-13. Les critiques n’ont pas manqué de pleuvoir ! Je ne suis pas surpris que les titres préférés du sondage soit tous les titres non chantés. Ce n’est pas mon album préféré, mais sa variété fait que je l’écoute plus souvent que d’autres. Merci pour les anecdotes de Kraftwerk (que Jarre a toujours cité comme un contre exemple de ce qu’il voulait faire !) et Kate Bush (que le compositeur a souvent cité parmi les artistes de qui il se sentait proche ; elle est aussi une des premières à avoir acheté le couteux Fairlight CMI) que j’ignorais.