Le 10 octobre 2004, Jean Michel donne un concert à Pékin dans le cadre de l’année de la Chine en France. Cet évènement planétaire est composé de deux parties : un grand concert au cœur de la Cité Interdite (palais d’un kilomètre carré, devenu aujourd’hui un musée), suivi d’une performance sauvage, c’est-à-dire visiblement pas assez répétée sur la Place Tienanmen [orthographe laissée au bon vouloir du traducteur],devant 16.000 privilégiés. Quand au président Chirac, il fera faux bond au dernier moment. Treize ans après sa tournée triomphante en Chine, Jarre retrouve la terre de ses exploits, devant les officiels du régime, et toutes les complications administratives et sécuritaires que cela draine. Mais c’est aussi le résultat d’un an d’investissement personnel. Il en va aussi du côté visuel du spectacle, puisque, à titre d’exemple, Jarre bataillera jusqu’à la dernière minute pour l’élagage des arbres de la Cité Interdite, qui gâche une partie du dispositif scénique. Jarre bataillera également pour obtenir que des musiciens chinois critiques envers le régime puissent figurer sur scène, étant plus ou moins entendu. Dans le documentaire du DVD, vous verrez le Jarre diplomate à l’œuvre dépenser une énergie incroyable à faire en sorte que sa prestation se déroule dans les meilleures conditions possibles. Avant le concert sont diffusées sur écran géant une centaine de photographies de l’AFP sur le thème « Diversité de la France ».
> Techniquement irréprochable
Outre la captation en haute définition, l’innovation sonore de ce concert pour les spectateurs vient du son 5.1 (surround), qui est donné au public. Chaque carré de terrain est installé comme un véritable ensemble home-cinéma, travail considérable assuré par une entreprise français spécialiste de ce domaine. Dans le cahier des charges de ce concert exceptionnel, Jarre a impliqué des artistes chinois, à la fois des musiciens (Classique, traditionnel, et pop) et des artistes (peintres et vidéastes, qui participent à l’illustration de la musique en projections lumineuses). Des images du métro parisien et un kaléidoscope de monuments de Paris sont diffusés.
Le concert est diffusé en direct à la télévision centrale chinoise, ce qui représente la bagatelle d’un milliard de téléspectateurs. Lors de ce concert, outre quelques mots de courtoisie dits en chinois, Jarre prononce en français les mots Liberté, égalité, Fraternité (dans une émotion certaine, au point d’inverser les deux derniers mots), qui sont également projeté sur les structures gonflables carré, rond, triangle sur scène. Ce geste symbolique, lui aussi, aura été discuté par les autorités avant de laisser faire l’artiste français.
Pour des raisons de patrimoine, les feux d’artifice sont proscrits. Les équipes techniques de Jarre utilisent des confettis et des effets mécaniques (soufflerie) et lumineux pour animer la scène. Entre les deux concerts, Jarre, visiblement crispé ou fatigué, sort prestement en passager d’un side car pour rejoindre en quelques minutes la scène de la place Tienanmen où l’attendent déjà deux musiciens underground chinois : une chanteuse et un joueur de clarinette.
> En avant, la musique
Jean Michel est accompagné sur scène par son inséparable complice Francis Rimbert. Nombre de musiciens chinois sur scène, dont l’orchestre symphonique (92 instrumentistes) et l’orchestre traditionnel (72 instrumentistes) de Pékin. Ce dernier intervient surtout sur une nouvelle version de Jonques de Pêcheurs au crépuscule, qui n’avait pas été joué depuis le concert de Hong-Kong en 1994 ! Les instruments chinois millénaires, l’erhu [photo ci-contre] (deux cordes frottées par archet, sur une table de résonnance en bois), et la famille des cordes à pincer : la pipa (variété de luth), le gu zheng (cithare sur table) sont donc à l’honneur, aux cotés des derniers synthétiseurs. L’orchestre est sollicité sur Rendez-vous II et l’Ouverture du premier concert. La plupart des morceaux joués à la Cité Interdite sont issues du disque Aero.
Jarre joue de la flûte à contrôleur MIDI sur Oxygène 2. Patrick Rondat, le flamboyant guitariste, intervient notamment sur L’Hiver de Vivaldi. Le morceau Aerology aura été lui, joué sur les deux sites, la première en version Aero, et la deuxième, dite « remix », avec une participation plus active de Claude Samard, à la guitare.
Restranscriptions : DVD (s) et livre
De ce concert est issu deux DVD succesifs, le second effaçant la frustration du premier : Le DVD simple, Live à Pékin (pochette ci-contre), malheureusement incomplet, suivi quelques mois plus tard par l’édition collector 2 DVD (le concert complet) + un CD de 70 minutes du concert. Ce DVD, intitulé Jarre in China, est le premier concert au monde diffusé en son THX (la norme de George Lucas). Un livre d’images a également été édité à 3.000 exemplaires. Jarre double disque de platine pour l’édition simple du DVD :
JEAN-MICHEL JARRE | LIVE IN BEIJING | WARNER VISION France/WARNER VISION France | Sortie : 07/12/2004 | Double disque de platine : 20/10/2005 | Soit au bout de : 10 mois |
Liste des musiciens : Francis Rimbert (claviers), Patrick Rondat (guitare), Claude Samard (coordination musicale avec les chinois, notamment).
Orchestre symphonique de Pékin, Orchestre national de Chine, Chœur national de l’opéra de Pékin.
Musiciens chinois : Cheng Lin (chanteuse pop), Lin Yuan, Wang Feng, You Hong Fei, Yang Shi Yi.
Track-list du concert de la Cité Interdite
- FORBIDDEN CITY (morceau purement symphonique)
- AERO
- OXYGENE 2 (accompagné au Ehru)
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OXYGENE 4
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GEOMETRY OF LOVE (accompagné par un clarinettiste chinois) Vidéo ci-dessous :
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PETIT ORCHESTRE SOUS LA PLUIE (version raccourcie de l’Orchestre sous la pluie, jouée par Claude Samard à l’orgue de barbarie, petit clin d’oeil au régime du même nom ?)
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EQUINOXE 4 (solo final à la clarinette)
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VOYAGE A PEKIN (en réalité le symphonique Acropolis, accompagné au Ehru, beau à pleurer)
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CHRONOLOGIE 6 (version Aero)
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[Intro : ThereminMemories] ZOOLOOKOLOGIE (Morceau assez rare en concert, malheureusement en version Aero que je n’aime pas beaucoup)
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AEROZONE
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AEROLOGY
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CHRONOLOGIE 3 (Diva chinoise, Harpe Laser, avec Patrick Rondat)
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VIVALDI : »L’Hiver » (par Patrick Rondat)
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JONQUES DE PECHEURS AU CREPUSCULE (+ intervention à la flûte MIDI)
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RENDEZ-VOUS 4 (la version d’Aalborg)
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SOUVENIR DE CHINE (avec une jeune chinoise qui prononce quelques mots de mandarin pendant le morceau)
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RENDEZ-VOUS 2
> Track-list de la Place Tian’anmen
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ARRIVÉE
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AEROLOGY « Remix »
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LA FOULE (Hommage à Edith Piaf, assez raté)
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TIAN’ANMEN (Inédit)
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OXYGENE 13
> Appréciation d’ensemble
Pour me finir, le concert principal, s’il est un peu froid en interprétation (beaucoup de presets), est bien ficelé, et fait une belle part aux artistes chinois. Le concert sur la Place Tienanmen souffre d’un play-back trop visible. À la décharge de Jean Michel, il faut savoir qu’il a dû répété dans des conditions limites (à l’oreillette sur la Cité Interdite, une seule fois sur la Place Tien’Anmen, alors que sa femme était à l’hôpital) et que la scène de Tien An’men a été démonté la veille du concert, chamboulant tous les projets du musiciens français. Tout ceci est explicité sur le bonus du DVD Collector (Jarre in China).
> Les coulisses du concert (Bonus du DVD)
> Interview de Jarre par l’ambassade de Chine en France
Que représente pour vous le concert du 10 octobre 2004 à Pékin ?
(…) J’ai entretenu beaucoup de relations avec les intellectuels et les artistes chinois et quand l’AFAA, dépendant du Ministère français des Affaires étrangères, m’a demandé de réfléchir justement au concert d’ouverture de l’Année de la France en Chine, je m’en suis fortement réjoui. C’est un très grand privilège et un très grand honneur pour moi. Je suis venu à Pékin à plusieurs reprises, depuis un an maintenant, pour réfléchir à ce que ce concert devrait être, pour prendre contact et parler avec des amis intellectuels et artistes chinois pour réfléchir à sa signification, à la manière dont les choses pourraient se faire. Il me semblait important d’impliquer, d’intégrer un certain nombre d’artistes chinois à Pékin dans mon concert, justement parce que c’est un peu le symbole des Années croisées et que chronologiquement cela se passe à la fin des Années de la Chine en France et au début de l’Année de la France en Chine.
L’orchestre symphonique de Pékin au grand complet (92 musiciens), qui est à mon avis l’un des meilleur orchestre au monde, participera au concert.
J’intègre également l’orchestre traditionnel de la ville de Pékin qui utilisera des instruments chinois tels que le erhu, la pipa, le gu zheng. Cet orchestre est également une formation symphonique puisqu’ il est constitué de 72 musiciens. J’ai par ailleurs souhaité intégrer au projet des gens de la scène électro et de la scène rock chinoises. Seront présents également des gens de la scène arts plastiques, c’est-à-dire des peintres, mais aussi des photographes et des vidéastes.
Enfin, des techniciens de scène chinois participeront au montage du projet lui-même sur le plan technique. C’est donc une réelle collaboration avec les Chinois. Sur le plan musical, ce projet est également une vraie création ; la musique sera composée à la fois de morceaux que j’ai composé auparavant, que les chinois connaissent déjà et de créations originales spécialement conçus pour l’occasion, incluant des morceaux plus spécifiquement chinois.
Quel est selon vous la particularité du public chinois ?
C’est un public extrêmement particulier, très dissipé. Je compare beaucoup le public chinois au public italien, les Chinois sont un peu à mes yeux les Latins de l’Orient, c’est un public qui bouge beaucoup, surtout dans la Chine du sud. Le public chinois est assez dissipé, mais en même temps est d’une certaine manière extrêmement cultivé. C’est-à-dire qu’il existe une culture, une culture ancestrale du pays, qui fait que le public chinois, même s’il n’est pas nécessairement au courant de ce qui se fait aujourd’hui, est un public qui traditionnellement est assez tourné vers la culture et les arts. C’est un public qui est imprégné d’art et de culture depuis tellement longtemps, même si il y a eu toute la période maoïste qui est maintenant très largement derrière eux bien qu’encore présente. Il est très réceptif, très curieux, très espiègle, très dynamique.
Votre dernier album Aéro comporte notamment un enregistrement pris dans le vol Paris-Pékin, n’est-ce pas ?
Oui, c’est vrai qu’au cours de mes différents voyages en avion entre Paris et Pekin, j’ai composé avec mon ordinateur , ce qui m’était déjà arrivé à l’époque des premiers concerts en Chine, puisque j’avais fait, durant le vol retour, un morceau qui s’intitule Souvenir de Chine. Lorsque je suis rentré de Chine, j’étais tout imprégné de mon séjour et j’ai écrit – à cette époque là sur papier, avec une partition – une mélodie et un thème qui était un petit peu comme un journal musical. J’avais écrit un morceau de musique dans l’avion, la mélodie, et quand je suis rentré, je l’ai composé. C’est drôle, c’est un peu par hasard que plusieurs années plus tard, il se soit passé un peu la même chose dans le sens inverse mais cette fois-ci avec la technologie d’aujourd’hui, car j’ai pu enregistrer quasiment complètement avec l’ordinateur portable.
Comment vous est venue l’idée d’enregistrer dans l’avion ?
En fait l’inspiration est venue en regardant par le hublot, il y avait des nuages qui formaient des paysages de montagnes imaginaires, faisant vraiment penser à un paysage chinois, c’est cette image qui m’a donné l’idée de faire le morceau en question.
Qu’attendez-vous de votre concert en octobre 2004 ?
(…) Evidemment la Chine a depuis complètement changé. Le pays change tous les ans, à chaque fois que je reviens en Chine je vois à quel point le pays se transforme. J’attends de ce concert d’abord qu’il soit en phase avec les attentes de l’Année de la France en Chine. L’Année de la France en Chine va se dérouler sur les deux années 2004 et 2005, avec beaucoup de manifestations prestigieuses et c’est une responsabilité d’ouvrir cette année. Je voudrais qu’elle puisse véhiculer au mieux, de manière poétique, de manière un peu décalée et musicale, l’identité de notre pays pour le public chinois et ce qu’est la France pour le public chinois aussi bien sur le plan musical, sur le plan visuel , et sur le plan technologique puisque qu’il s’agira du premier concert diffusé en surround 5.1, c’est-à-dire en son cinéma, avec des hauts parleurs d’une très haute qualité situés autour du public. La haute définition sera présente aussi bien dans la scénographie que pour la réception télévisée. C’est un projet assez innovant qui je pense, j’espère en tous cas, sera à l’image de l’Année de la France.
Pensez-vous réellement que l’Année de la France en Chine permettra de développer la coopération artistique entre la France et la Chine sur le long terme ?
Je pense que cela dépend de nous tous. Je pense que l’Année de la France en Chine sera ce qu’on en fait, ce que les Français veulent en faire. Je pense que c’est une opportunité très importante pour la France de se frotter au pays le plus peuplé du monde, de pouvoir lui montrer ce que nous sommes, de pouvoir influencer culturellement et aussi profondément que possible leur propre culture, ce qu’on appelle d’ailleurs tout simplement l’échange entre les hommes. Une année, on peut dire que c’est éphémère par rapport à la vie de deux pays, et donc que les manifestations qui feront partie de ce programme le sont par définition, mais souvent les choses éphémères dans une vie sont celles dont on se souvient le plus. On se souvient souvent de la première fois où l’ on est allé au théâtre, de la première fois où l’on est allé à un match de foot ou au cirque. Il s’agit d’événements qui ne durent que quelques heures, mais dont on se souvient pourtant toute sa vie. Je crois donc que la force d’une Année de la France en Chine est justement de pouvoir présenter suffisamment de manifestations différentes, originales et que ces manifestations marquent les esprits chinois pour longtemps.
Aspects techniques du concert :
- 300 mètres cube d’équipements divers
- 100 kW de son 5.1 20 km de câbles
- Le système de sonorisation comprenait 36 V-DOSC, 108 dV-DOSC et 24 caissons de graves SB218, ainsi que 115 retours FM et 130 amplificateurs LA, 30 processeurs de sonorisation XTA, 9 BSS SoundWeb
19 avril 2009 à 23:41
Bonjour,
Un peu partout on peut voir la vidéo de concert de JM Jarre avec le guitariste P Rondat qui interprète Vivaldi (l’hiver).
Sur quel disque ce morceau figure t il et ou puis je le télécharger.
Merci bien
Thierry
10 novembre 2009 à 17:25
Je ne sais aps sur quel disque mais en parcourant les clip tu retrouvera certainement le titre ! Puis vas sur amazon et fais des recherches par album !
10 novembre 2009 à 23:20
ce titre figure sur l’album Amphibia de Patrick Rondat, ou alors en vidéo il y a « concert pour la tolérance » , »concert à Pékin 2004″
12 novembre 2009 à 1:03
attention tout de meme car le titre c’est « l’été » , ils se sont planter sur le titre ecrit sur la pochette du dvd
12 novembre 2009 à 2:01
il est aussi sur le dvd live du concert « solidarnösc »