Eclectisme est le maître-mot pour définir Ryuichi Sakamato. À travers ses activités de compositeur, d’interprète et de producteur, il aura touché à tous les styles de musique. Sa liste de collaborations est impressionnante, et il a publié une vingtaine d’albums studios sous son seul nom. Le jeune homme a étudié la musique à l’Université des Beaux-Arts et de la musique de Tokyo. Passionné de composition et de piano classique (Claude Debussy), de peinture (les impressionistes) mais aussi de rock et de Kraftwerk, Sakamoto se spécialise en musiques électronique et ethnique. Il travaille comme musicien de studio pour gagner sa vie à la fin des années soixante-dix. Puis, en 1978 parait son premier album solo, The Thousand Knives of Ryuchi Sakamoto. L’album contient les titres à succès The End of Asia et Thousand Knives.
> Yellow Magic Orchestra : éphémère folie mais influence durable

Le groupe Yellow Magic Orchestra se dissout à la fin de 1983. Hosono et Takahashi rejoignent des projets de musique de films, de musiques ambient pour l’un, des groupes rock expérimentaux pour l’autre. Des albums live fleurissent après leur séparation, à partir de 1984. En réalité, ce n’est qu’une longue hibernation pour le trio qui renaitra bien des années plus tard. Technodon (1993) marque en effet le retour officieux du groupe, mais sous le nom de « Not YMO » ou avec le sigle YMO barré. Il faut attendre 2007, dans la grande vague des reformations des groupes mythiques (Led Zeppelin, The Police…) pour que YMO refasse parler de lui en nom propre (voir la fin de l’article).
> Du solo au cellulo

Sakamoto collabore avec les plus grand noms de la musique : David Byrne (du groupe Talking Heads), Iggy Pop, Bill Laswell, Caetano Veloso, Thomas Dolby, Towa Tei (du groupe Deee-Lite), Nam June Paik, Youssou N’Dour, Mick Jagger, Sly Dunbar, Roddy Frame (d’Aztec Camera), Robin Scott, Hector Zazou et Cesaria Evora. Il lance des concepts-albums à intervalles réguliers, mais ne délaisse pas pour autant le grand écran. De l’ordre de 25 collaborations avec le cinéma à ce jour !
> Ryuichi fait son cinéma
Au fil du temps, de nombreux réalisateurs talentueux se sont attaché les services de Ryuichi : Pedro Almodovar pour Talons Aiguilles (1992), François Girard pour Silk (2007), Brian de Palma pour Talons Aiguilles (1992), Snake Eyes (1998) et Femmes Fatales (2002).
Des extraits de certains de ses albums sont utilisés pour des films récents : c’est le cas de Chinsagu No Hana (extrait de Beauty) dans Japanese Story (2003), et de Bibo No Aozora (extrait de 1-9-9-6) dans le thriller Babel (2006).Les studios d’animation Gainax lui commande en 1987 la musique du long-métrage Royal Space Force: les ailes de Honneamise, qui est un véritable carton au Japon. Le prix du meilleur clip décerné par MTV à Risky met en lumière le duo Sakamoto / Iggy Pop en 1987, qui s’illustre sur l’album de la maturité de Sakamoto, Neo Geo, même si elle est décriée par les critiques comme une production trop «lisse» et trop «hétéroclite».
> Le virage néo-classique

Pour l’album Beauty (1989), il invite des instruments traditionnels japonais comme le ehru, ainsi que des chanteuses de musique traditionnels de la région d’Okinawa, à se frotter à Brian Wilson, Jill Jones, Robbie Robertson et Youssou n’Dour sur un disque à forte connotation world music.
Sakamoto répond favorablement à la demande du Comité Olympique International pour créer la musique de la Cérémonie d’Ouverture des Jeux Olympiques de Barcelone en 1992.
> Le retour aux sources japonaises
Les années 90 seront celles de tous les métissages. Avec les disques Heartbeat (1991) et Sweet Revenge (1994). Elles seront aussi l’occasion de la découverte de la musique des caraïbes et de l’Amérique du sud, au détour de l’album Smoochy (1996). Parallèlement à son attrait pour la bossa nova, qui coïncide avec son jeu de la main gauche caractéristique, Sakamoto balaie son répertoire de manière dépouillée et acoustique (clavier-violoncelle et violon) avec l’enrgistrement de 1-9-9-6. Il signe chez sur le label classique Sony classical.
En 1998, Sakamoto sort son premier disque 100% classique, l’album Discord, une suite orchestrale en quatre parties. Des artistes techno remixent des fragments de cet album, parmi lesquels DJ Spooky, Talvin Singh et Amon Tobin. C’est probablement à cette époque que la scène underground plébiscitent Sakamoto en lui coulant une statue de commandeur des pionniers de la musique électronique.BTTB (initiales de « Back to the Basics ») poursuit l’effort académique de Sakamoto, en s’appropriant au piano des standards des années 80, comme Energy Flow ou encore Tong Poo. Suite à cet album, il part en tournée américaine avec le BTTB U.S. Tour, où il fait une première partie derrière les platines.
> L’attrait des planches
L’opéra pop »LIFE » voit le jour en 1999. Il s’agit d’un projet multimédia de grande ampleur. Bernardo Bertolucci, Salman Rushdie et le Dalaï-Lama participe à l’écriture du livret ou du moins son inspiration. Il mobilise 100 comédiens, chanteurs et danseurs, parmi lesquels figurent Pina Bausch et le ténor José Carreras. Toujours passionné de multimédia, en 2000, Sakamoto s’associe à Sega par l’intermédiaire de son ami Kenichi Nichi du studio LOL pour la bande-son mélancolique de l’un des premiers jeux de rôles évolutifs de l’histoire du jeu vidéo, Lack of Love (L.O.L).
Pendant ce temps, les deux ex-YMO Hosono et Takahashi se réunissent de nouveau dans un mini-groupe nommé le Sketch Show. Sakamoto rejoint le groupe en pointillés pour des enregistrements sauvages et décide d’appeler ce regroupement précaire Human Audio Sponge (H.A.S.).
En 2001, Sakamoto fait l’odyssée de l’espace entre les genres, passant du grandiloquent à l’intimiste, avec un certain nombre de projets singuliers. Et en premier lieu, un trio jazz en 2001 et 2002, aux côtés d’Antonio Carlos Jobim, qui lui permettent de retrouver le violoncelliste du projet 1-9-9-6, Jaques Morelenbaum et sa femme.
> Projets récents
En 2005, le fabricant de mobile Nokia lui commande des sonneries pour son nouveau-né, le Nokia 8800.
Puis une série de disques hermétiques dans le monde de l’eclectronica glitch, c’est-à-dire en forme de labyrinthe numérique. Vrioon (2003) et Insen (2007) et Utp_ (2008), en collaboration avec l’allemand Alva Noto, d’une part, et Christian Fennesz, l’australien, de l’autre (Cendre, 2007). L’ensemble de ces productions et prestations live (derrière des Mac) reçoivent un accueil critique enthousiaste.
C’est une marque de bière japonaise, Kirin, qui pousse les trois anciens membres du Yellow Magic Orchestra à se former à nouveau, le temps d’une campagne publicitaire en 2007. Finalement, le groupe se retrouve, rebaptisé HASYMO pour lancer le single « Rescue », puis un DVD, « HAS/YMO » en 2008.
> Discographie solo
- Thousand Knives (1978)
- Summer Nerves (1979)
- B2-Unit (1980)
- The End of Asia (1981, avec Danceries)
- Left-Handed Dream (1981) (les versions japonaises et internationales sont des track-lists différentes)
- Ongakuzukan (1984)
- Esperanto (1985)
- Illustrated Musical Encyclopedia (version internationale de Ongakuzukan) (1986)
- Futurista (1986)
- Coda (1986)
- Neo Geo (1987)
- Tokyo Joe (1988, avec Kazumi Watanabe)
- Playing the Orchestra (1989)
- Beauty (1990)
- Heartbeat (1991)
- Soundbytes (1994, compilation de titres enregistrés entre 1981 et 1986)
- Sweet Revenge (1994)
- Smoochy (1995)
- 1-9-9-6 (1996)
- Discord (1997)
- BTTB [Back to the Basics] (1998)
- Cinemage (1999)
- Intimate (1999, avec Keizo Inoue)
- L I F E (2000)
- Zero Landmine (2001)
- Comica (2002)
- Elephantism (2002)
- Love (2003)
- Vrioon (2003, avec Alva Noto)
- World Citizen (2003, avec David Sylvian)
- Chasm (2004)
- Moto.tronic (2003, Compilation de titres enregistrés entre 1983 et 2003)
- Insen (2005, with Alva Noto)
- Sala Santa Cecilia (2005, maxi-live avec Fennesz)
- Cantus omnibus unus, for mixed or equal choir (2005)
- Bricolages (2006)
- Cendre (2007, avec Fennesz)
- Ocean Fire (2007, avec Christopher Willits)
- Utp_ (2008, avec Alva Noto)
- Koko (2008)
> Discographie avec Yellow Magic Orchestra
- Yellow Magic Orchestra (1978)
- Solid State Survivor (1979)
- BGM (1980)
- Technodelic (1981)
- Naughty Boys (1983)
- Service (1983)
- Technodon Pas de droits sur l'album (1993)
> Ressources sur le web
- Site officiel de Ryuchi Sakamoto (en anglais)
- Technopolis :
3 octobre 2010 à 16:26
J’ai decouvert Sakamoto, comme beaucoup, par le titre « Forbidden Colors », extrait de la BO de Furyo, sur la compilation « Studio » qui rassemblait de chouette musiques de film des annees 80. Ce theme de Furyo est une musique qu’on oublie pas; electronique mais tres empreinte d’influence asiatique, dont cette envoutante rythmique de cymbales. J’aime aussi beaucoup Le Dernier Empereur, notamment « Rain » qui illustrait une pub, sur le TGV, si je me rappelle bien…