Voici la première partie de la biographie d’un des groupes les plus respectés en musique électronique : Cluster ! Il se compose de façon atomique sur le dup Hans-Joachim Roedelius et Dieter Moebius (photo ci-contre). L’histoire de Cluster prend naissance au sein du mythique Zodiak Arts Free Lab de Berlin, en 1967, lieu que Hans-Joachim Roedelius (né en 1934), Boris Schaak et Conrad Schnitzler (né en 1937) fondent. C’est dans cette scène ouverte que se font et se défont les groupes d’avant-gardes allemands. En 1969, Dieter Moebius (né en 1944) et Schnitzler, qui se connaissaient pour être camarades à l’école des Beaux-arts de Düsseldorf s’associe à Roedelius pour former le groupe Die Klusters (avec un « K ») ou Kluster. [NDLR : Un artiste electronica suèdois du nom de Michael Pettersson s'est approprié ce nom depuis 2000].
Sur scène, le trio expérimente les procédés d’amplification et de dissonances (d’où le nom du groupe), avec des objets du quotidien et toute une panoplie d’instruments acoustiques. Mais les premiers enregistrements de nos mousquetaires du bruit de casserole sont le fruit d’une inspiration divine. Un organiste d’église audacieux leur commande deux albums pour évangéliser grâce à la « Neue Musik », en intégrant des textes religieux en forme d’intro de chaque morceau. Ainsi naissent leurs deux premiers albums, parus en 1969 et 1970 Klopfzeichen et Zwei-Osterei sont pressés chacun à seulement 300 exemplaires.
> Au centre de la musique cosmique
Parallèlement, Tangerine Dream enregistre Electronic Meditation, également avec Schnitzler, qui est surnommé amicalement « le fou de Berlin ». C’est Konrad « Conny » Plank (qui est l’artisan du son de bon nombre de figures du Krautrock) qui assure le traitement électronique des instruments acoustiques. Conny fera partie de l’aventure Cluster en tant que troisième homme sur l’album éponyme de Cluster. Il travaillera avec eux jusqu’à sa mort, en 1987. Le groupe commence à tourner en Allemagne en étonnant partout où il passe avec ses bandes magnétiques, son absence de mélodie et ses sonorités industrielles, en 1970. C’est d’ailleurs un album live, Eruption, qui témoigne de cette courte période. Il coïncide avec la mue de Kluster en Cluster (avec un « C »), la traduction latine du mot allemand, d’une part, et le départ de Conrad Schnitzler, d’autre part.
> Cluster : nouveau nom, style moins sombre mais aussi expérimental
Cluster sort son premier album éponyme en 1971, seul album sorti chez Philips, suivi de Cluster II l’année suivante, signé par la firme Brain records, de Bruno Wendel et Gunter Korber. Les pochettes des albums sont du style de la musique cosmique qui fait rage en Allemagne à ce moment-là, autour de Rolf Ulrich Kaiser chez Ohr records. Le groupe tourne en Europe et au Maghreb. Ce sont des albums très improvisés et très influents sur beaucoup de groupes, au premier rang duquel on trouve Kraftwerk.En 1973, Roedelius et Moebius montent un studio privé avec le fondateur de Neu !, le guitariste Michael Rother, à Forst. Il créé un groupe éphémère ensemble nommé Harmonia, qui sort deux albums, plus facile d’accès : Musik von Harmonia (1974) et Harmonia Deluxe (1975), qui utilise de manière systématique une boite à rythmes. Leur première tournée en trio est présentée en CD, Live 1974. Entre-temps, Cluster refait surface avec Zuckerzeit, en 1974, ayant gagné en approche mélodique de la structure davantage rock voulue par Rother.
> Une rencontre importante : Brian Eno
En 1976, Brian Eno, qui a fraîchement quitté Roxy Music et posé les bases du style ambient avec Another Green World, s’invite dans le groupe aux côtés des trois hommes. Cluster poursuit ses aventures avec l’album Sowiesoso, en signant sur le label Sky, en 1976. Roedelius occupe ses séances de studio en solitaire avec une série de compositions qui deviendront partie de la série des autoportraits musicaux au piano et synthétiseur (Selbstportrait, enregistrée entre 1973 et 1978), publié ultérieurement sur Sky. Mais avec l’arrivée de cette figure de la musique pop, chanteur et auteur de texte qui voit son nom grandir dans l’ombre de David Bowie, Cluster va gagner les oreilles des journalistes musicaux. Le super-groupe Cluster&Eno amène aussi dans ses bagages le bassiste de Can, Holger Czukay, et enregistrent toujours dans les environs de Cologne plusieurs projets simultanément, dans délais très courts. Ils produisent deux prestations très éclectiques, dont le premier avec le claviériste Asmus Tietchens (Cluster&Eno[1977]), consolidé avec After the heat [1978]). Eno parti pour poursuivre son chemin avec les Talking Heads et sa carrière solo, en 1979, Peter Baumann produit leur album Grosses Wasser.
> Les années quatre-vingt
Pour ouvrir les années 80, le duo expérimental monte sur scène avec Joshi Farnbauer, lors d’un concert à Vienne. Des extraits de ce concert seront réédités sur les deux premiers albums de Kluster. En 1980 et 1981, Dieter Moebius et Conny Plank, qui sort exceptionnellement de son rôle d’ingénieur du son, sortent deux albums de collaboration, Rastakraut Pasta et Material.En 1981, Moebius et Roedelius mette la dernière main à l’album Curiosum, qui scellera le début d’une parenthèse de 8 ans du groupe, et sera le dernier album original paru chez Sky. Moebius continuera à travailler sur des albums avec Conny Plank (En route, 1986), tandis que Roedelius se consacrera surtout à sa carrière personnelle. Pendant cette période, la maison de disques de Cluster sort des compilations et des inédits, surtout de la période de Cluster&Eno.À suivre…
> Ressources sur le web
- Reportage de la télvision allemande sur les débuts du groupe avec photos d’archive :
- Le Myspace de Cluster, reformé en 2007.
17 janvier 2009
Avant-gardes, Krautrock, Musiciens suisses ou allemands, Portraits