Après avoir réconcilié fans de techno et de rock et réalisé leur meilleur combo avec Surrender (1999), les Chemical avaient un défi de taille à relever avec Come with us : ne pas décevoir. J’ai découvert l’album au travers du clip de Michel Gondry Star Guitar, premier single, qui capture bien la décoction de la répétition (les heures du duo à travailler telle ou telle rythmique) et le traitement vintage (noir et blanc) qu’il semble vouloir donner à leur musique. Le titre de l’album est une invitation à une sorte de quête spirituelle et temporelle, au travers de beats cathartiques, même s’il s’ouvre sur staccato de cordes dignes d’un film d’horreur : «Come with us and let everything behind» (Venez avec nous et laissez tout derrière vous), nous ordonne une voix capiteuse.
La production des albums Dustbowl est donc majoritairement instrumentale, et suffisamment complexe pour nécessiter plusieurs écoutes pour détecter des effets (de l’EMS VCS-3) savamment distillés ici et là. Le minimalisme des compos en fait des exercices de style où les mots de Queneau seraient remplacés par des samples et les autobus par des mélodies ingénues. Il faut dire que, contrairement aux trois précédents, les maquettes ont été conçus sur l’interface Mac Logic Audio et la guitare MIDI Parker, avant d’avoir les sons patchés dessus par la suite. De guitare, les jeunes gens sont visiblement accroc, puisqu’ils vouent un culte à la Fender Telecaster(qui donne son nom à Star Guitar).
> Arrière-plans sonores
Entre big beat et funky dans des couloirs de séquences cinglantes, Tom Rowlands et Ed Simons produisent une fusion entre un monde dansant (It began in Africa) et trance/ambient (Pioneer Skies). It began in Africa intègre des percussions live et ses toms filtrés à mort, ce qui est une première, pour eux qui sont plutôt habitués aux boucles de snare drum « hand-made ». Avec le vitaminé Galaxy Bounce, les deux complices envoient la sauce question effets, s’inscrivant dans la longue tradition d’évangélistes de l’électro façon Afrika Bambaata et Grand Wizard Theodore. En gros, le matériel qui déborde de leurs tiroirs (synthés analogiques, samplers et boites à rythmes) ne reste pas inusité très longtemps !
« C’est ce qui nous dirige : quand nous sommes d’accord que quelque chose est bon même si cela ne colle pas avec ce que quiconque fait au même moment. (…) Nous ne voulons pas faire le même disque une nouvelle fois. Nous voulons trouver un équilibre dans lequel on sait que c’est nous, tout en essayant de tenter de nouvelles choses à l’intérieur de ce que nous faisons ».(Tom Rowlands, janvier 2002)
Visiblement, on s’amuse beaucoup dans le processus de création de titres protéiforme comme sur Hoops, très basique en apparence, mais où en triturant l’ordinateur, on fait passer des glapissements des deux loustics pour des aboiements de chien. Attention écho méchant !
> Un très bon (son) cru
L’album comprend deux chansons. Elles sont interprétées respectivement par la chanteuse Beth Orton(The state we’re in), déjà présente sur Surrender, et le rockeur Richard Ashcroft, du groupe The Verve, qui se soumet (pour de rire) au détecteur de drogue, dans le morceau-fleuve The test. Je trouve ça un peu dommage de terminer l’album sur ce titre, qui fait penser à du William Orbit en moins bien, en dépit de ses paroles puissantes.
« Même dans le titre avec Beth Orthon, qui est en lui-même méditatif et lent, nous ressentons ce sentiment d’excitation et de transcendance, de tension puis d’apaisement. Peu importe que ce soit rapide, lent, house ou hip-hop, pourvu que nous ayons cet influx nerveux ». (Ed Simons, janvier 2002)
Bref, un album très consitant du duo londonien, pas agressif si on tolère le bass drum de certains titres (My Elastic Eye) qui décolle le feutre des enceintes. À noter que le morceau “Come with us” a été remixé par Norman Cook alias Fatboy Slim, avec en deuxième face The Test.
> Tracklisting
27 février 2009
Big beat, CD / Divers, CD et Vinyles, Chemical Brothers, Disques 2000 et +