Moby sur l’industrie du disque (2009)

21 octobre 2009

JMJ en débat, Moby

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Il y a quelques semaines, je vous disais que Jarre et Moby avait déjeuné ensemble. Je n’ai pas de reportage à vous proposer là-dessus, mais en revanche, je suis tombé sur cette interview de Moby cet été 2009 où le musicien américain parle du business de la musique. Il m’étonnerait fort que Jarre et lui n’ait pas aussi évoqué ce sujet. Je vous joins la vidéo de cette interview de Moby avec Walter Mossberg du Wall Street Journal, que j’ai essayé de traduire au mieux en français. Il sera prochainement question sur En Attendant Jarre de son nouvel album, « Wait for me ».

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Journaliste : Dans le New York Times, on a relevé que d’après les données de l’association interprofessionnelle de l’industrie du disque des Etats-Unis (RIAA, Recording Industry Association of America), depuis que les ventes de musique ont connu un pic en 1999, le montant de leurs recettes, après ajustement de l’inflation, a chuté de plus de 50%. Alors sommes-nous sur le point de vivre la mort de l’industrie de la musique telle que nous la connaissions ? Moby : Hum… C’est une bonne question. Honnêtement, je n’en ai aucune idée. C’est quelque chose de difficile à évoquer, car pour moi être très honnête serait aussi « non-diplomatique » et me faire beaucoup d’ennemis dans le monde de la musique. Mais en dehors de ça, je pense que l’abandon des maisons de disques est l’une des meilleures choses qui ne soient jamais arrivés à la musique. Parce que… Il y a pratiquement une relation inverse entre la « profitabilité » de la musique et la qualité de la musique…. Sans vouloir être trop long… Mais 1999 qui a été un grand cru pour l’argent dans le business de la musique a aussi été un très mauvais cru pour les bons disques et la bonne musique.Journaliste : Est-ce que vous pensez que la musique s’est améliorée, au regard de ces évolutions ?

Moby : Je pense, oui. Parce que n’importe quelle personne qui rentre dans le business de la musique pour devenir riche est simplement un idiot.

Journaliste : Est-ce que vous pensez que les maisons de disques étaient malfaisantes, d’une manière ou d’une autre ? Et est-ce que cela signifie qu’à partir de maintenant, tout ce que nous allons avoir sera autoproduit ?

Moby : Je pense que les maisons de disques vont être forcées de se réinventer plus comme des éditrices de musique. Parce que depuis très longtemps, le business de la musique était très compartimenté. Vous aviez des maisons de disques, et leur seul travail était de mettre de la musique sur du plastique. Ensuite, vous aviez des firmes de «merchandising» qui faisaient des tee-shirts. Et puis, vous aviez des maisons d’édition qui publiaient la musique. Aujourd’hui, ce qui se passe, c’est que tout devient unifié. Alors les maisons de disques sont en train de se réinventé en «vendeur tout-en-un». Pour le meilleur ou le pire. Certaines maisons de disques sont en train de se réinventer à cause de l’argent. Cela n’a rien à voir avec leurs diplômes.  Et dans certains cas de figures, vous avez une maison de disques qui ne sait que commercialiser des disques et qui d’un seul coup veut s’impliquer dans vos tournées. C’est un peu comme d’avoir un plombier qui réparerai votre voiture.

Journaliste : Vous avez commencé quelque chose appelé « Mobygratis », qui permet à des jeunes cinéastes et artistes d’utiliser vos chansons gratuitement. Etait-ce un geste désintéressé ou parce qu’il le faisait de toute façon ?

Moby : Je n’envisageais même pas de faire carrière dans la musique. Et donc, je ne devrais peut-être pas dire ça, mais l’instant où quiconque écoute ma musique, j’en suis flatté. Qu’il l’écoute depuis un CD, un MP3 ou un fichier streamé, peu importe. Je ne pose pas la question de savoir comment on écoute ma musique, je suis simplement honoré et flatté que quelqu’un fasse l’effort de l’écouter. J’ai donc commencé ce site web (www.mobygratis.com) qui donne gratuitement de la musique aux cinéastes indépendants et étudiants en cinéma, parce que j’ai des tas d’amis qui sont des cinéastes indépendants, et ils se plaignent souvent d’à quel point il est difficile d’obtenir des droits sur de la musique pour de petits films. Et égoïstement, c’est aussi une manière pour moi de diffuser ma musique plus souterraine et expérimentale, qui autrement ne trouvera sa place nulle part.

Journaliste : Une étude l’année dernière a démontré que sur les 13 millions de titres en vente sur Internet l’année dernière, 10 millions n’ont pas trouvé le moindre acheteur. Et 80% de toutes les recettes provient d’à peu près 52.000 titres, ce qui fait moins de 1% de l’ensemble. (…) Apple et Itunes essaie de séduire les gens à acheter davantage d’albums digitaux, mais pensez-vous qu’ils vont réussir ?

Moby : Je ne veux pas être trop « non-diplomatique », mais un tas de problèmes que les maisons de disques sont en train de rencontrer, sont des problèmes qu’ils se sont attirés eux-mêmes. Comme le disait votre collègue tout à l’heure, pendant les années quatre-vingt dix, il est devenu de moins en moins cher de faire et de diffuser de la musique, mais les prix des disques ont continué à grimper. C’est presque comme si les maisons de disque avaient un monopole et essaient de voir jusqu’où ils pouvaient tirer sur la corde. C’est arrivé au stade où ils demandaient vingt dollars pour un CD qui leur coûtait autour de 7 cents à fabriquer. Je vous accorde qu’il y avait quelques frais généraux par-dessus. J’ai eu une discussion avec un de mes amis qui dirigeait un label important en 1998 et il m’a dit très précisément qu’il se foutait plus ou moins de la qualité d’un album, tout ce qui lui importait c’était qu’il y ait un single qui marche fort. Les onze autres pistes pouvaient être une réplique des 4 minutes et 33 secondes de silence de John Cage, il n’en avait rien à fichtre. Il voulait juste ce single qui cartonne, et tout le reste pouvait être de la daube.

 

 


 

 

À propos de Jean-Baptiste

Né en 1977. je ne vis pas de l'écriture, je ne vis pas pour la musique, mais je suis en quelque sorte à mi-chemin des deux. Peut être. ou pas.

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